Le premier cas clinique est traité par le Pr A. Penfornis.

Au travers d’un cas clinique nous avons abordé le sujet de la relation soignant-soigné, des représentations, du colloque singulier, et des réticentes qui existent autour de l’instauration d’une insulinothérapie.

Plusieurs études ont montré qu’il existe de fortes réticences (27% des patients dans UKPDS et 52% dans l’étude DAWN). L’initiation se fait à des niveaux d’HbA1c trop élevés (8.94% à 9.2% respectivement dans l’étude EDITH et ADHOC). Le délai pour prendre une décision de la part du patient est également long puisqu’il est d’un an.

En parallèle, les facteurs prédictifs de réponse à l’insuline sont le niveau d’HbA1c initial et la GAJ.

Ainsi, les barrières à l’instauration existent pour le patient diabétique et également chez le soignant et les raisons sont multiples.

Patient diabétique:

  • Traitement permanent
  • Peur des hypoglycémies
  • Douleurs des injections
  • Sentiment que l’insuline est peu efficace
  • Contrainte et perte de liberté
  • Prise de poids
  • Stigmatisation sociale…

Pour le soignant:

  • Peur des hypoglycémies
  • Crainte de pb d’observance
  • Crainte de la réticence du patient
  • Prise de poids
  • Manque de connaissance
  • Temps nécessaire pour l’éducation du patient et le suivi
  • Sujet âgé…

Par contre, une partie des réticences est levée quand on interroge ces mêmes patients une fois l’instauration de l’insuline effectuée. On constate ainsi un phénomène que nous voyons au comptoir par lequel les représentations autour de l’insuline sont fortes et diverses. Notre rôle vis à vis du patient sera important dans la compréhension du traitement et surtout dans la réassurance.

Un travail très intéressant avait été réalisé en 2004 lors du lancement de la glargine dans un programme appelé Alliance 7 avec les 7 règles d’or pour préparer le diabétique à l’insulinothérapie:

  • En parler tôt, quasiment à la première consultation
  • Se présenter comme un partisan d’un HbA1c<7 et non pas comme un partisan de l’insuline
  • Discuter du recours à l’insuline si l’HbA1c>7 malgré une bithérapie orale à dose maximale
  • Donner du temps au temps
  • Traduire l’HbA1c en objectifs glycémiques (à jeun ou au diner)
  • Soupeser avec le malade les inconvénients mais aussi les avantages de passer à l’insuline
  • Dire que l’insuline n’est pas une condamnation à vie

Il est important pour le patient qu’il s’appuie sur l’expérience de pairs autant que possible pour le rassurer sur l’insulinothérapie au quotidien.

Une publication récente de 2016 à partir de la cohorte de Rotterdam, montre que la moitié des patients DT2 à 45 ans ont un traitement par insuline d’où la nécessité d’en parler précocement.

La qualité du colloque singulier entre le soignant et le soigné est un élément clé en particulier l’écoute active. On retrouve dans le travail de l’Alliance 7 des règles qui sont bien connus et qui nécessitent avant tout de la pratique. Elles s’appliquent aux équipes officinales:

  • Abandonner toute attitude autoritaire
  • Éviter l’affrontement verbal
  • Poser des questions ouvertes
  • Respecter les silences du patient
  • Répondre aux questions du patient
  • Reformuler avec les mêmes mots
  • Relancer: s’impliquer et formuler des hypothèses
  • Aider le patient à rester dans le concret
  • Récapituler et fixer des objectifs

Une fois l’insulinothérapie acceptée, tout n’est pas gagné car un poster présenté à l’EADS 2015 montre qu’à deux ans, le pourcentage de patients qui n’atteignent pas l’objectif se situe entre 25 et 33 %.

Si le patient n’atteint pas un HbA1c< 7% à 3 mois, alors il y a de forts risques qu’il ne soit pas atteint à 24 mois. Il s’agit d’un facteur pronostic important. La fragilité des patients et le nombre d’hypoglycémies contribueraient à la non atteinte des objectifs à 3 mois.

Le nombre d’arrêt de traitement est significatif et peut atteindre 33% dans certaines études.

La mise sur le marché de nouvelles insulines lentes à la place du détémir et de la glargine 100U/ml (U100) constitueront une option supplémentaire. Il s’agit de la glargine 300U/ml (Toujeo®) et du degludec (Tresiba®).

Reste que la motivation des malades est un facteur majeur et qu’elle est liée aux bons résultats glycémiques. L’existence de programme d’accompagnement s’appuyant sur des outils connectés et l’intervention infirmier via le téléphone montre un bénéfice.

Pour conclure, l’orateur a souligné que l’insuline n’est pas un médoc comme les autres:

  • Fortes représentations négatives
  • Effets secondaires
  • C’est une piqûre
  • Nécessité d’adapter soi-même la dose
  • Traitement efficace, d’autant plus qu’il est commencé “tôt”
  • Vécu positif à postériori
  • Simplification continue du traitement…

Au final, une présentation très riche qui nous ramène directement au comptoir et à l’accompagnement que nous proposons ou pas à nos patients. On constate que nous avons beaucoup de travail pour investiguer auprès du patient, le vécu de son insulinothérapie. Durant cette présentation et les suivantes, il n’y a que peu de place faite pour les autres professionnels de santé impliqués dans le parcours de soin. Des sessions sont prévues autour des paramédicaux. A suivre…

JS

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