Neutropénie fébrile et biosimilaires

L’opportunité d’une conférence à la MASCC 2022 Toronto sur les facteurs de croissances cellulaires et les biosimilaires dans le cadre des neutropénies fébriles est parfaite pour faire le point sur la situation de la France par rapport aux autres pays européens et canadiens sur ce sujet.

En effet, l’enjeu des biosimilaires se révèle extrêmement important en terme d’accès aux thérapies innovantes à moindre coût, de place du pharmacien dans le droit de substitution notamment dans les GSF, véritables boosters des leucocytes pour traiter et prévenir les neutropénies fébriles, effet secondaire fréquent des chimiothérapies.

Bref rappel sur le biosmilaire : il est très similaire mais pas identique comme peut l’être le générique d’un princeps : similaire car c’est une copie d’un produit innovant, développé à l’échéance du brevet, dont les données d’AMM sont plus réduites que celle du princeps. Le biosimilaire aura des différences de structure, de process de fabrication, d’approbation ; les autorités lui reconnaissent une équivalence pharmaceutique et thérapeutique et surtout son interchangeabilité. De poids moléculaires comparés, l’aspirine pesant 180 daltons, l’insuline 32 fois plus (5808 daltons), l’érythropoïétine 170 fois plus (30 400 daltons), l’anticorps monoclonal IgG1 830 fois plus (150 000 daltons). Le process de fabrication nécessite de modifier l’ADN d’une cellule pour qu’elle produise une protéine souhaitée dans un bioréacteur.

Etant donné leur nature, les produits biologiques peuvent entrainer une immuno-génicité non souhaitée (formation d’anticorps anti-médicaments avec une possible baisse d’efficacité et d’augmentation des effets secondaires ; dont il faut tenir compte.

Notion de substitution : La substitution selon l’approche canadienne : soit sur la base d’une même dénomination commune (même structure chimique, sels différents avec dose équivalente élémentaire), soit par une DCI différente en fonction du portrait clinique du patient dite substitution thérapeutique. Cette substitution thérapeutique peut être envisagée, décidée en cas de rupture d’approvisionnement ou d’arrêt de commercialisation, pour un problème d’administration, un souci de sécurité sans possibilité de joindre le prescripteur, en cas d’indisponibilité dans l’établissement de soin (en absence de la mention en toutes lettres « non substituable » du prescripteur ; en l’absence de deux échecs thérapeutiques du patient sous biosimilaires). Elle s’accompagne au Canada d’une responsabilité du suivi de l’état de santé du patient en terme de condition physique et mentale, de suivi biologique (prescription et analyse de laboratoires sont possibles pour le pharmacien canadien, ajuster l’ordonnance par rapport au ratio objectif/tolérance et expliquer le bon usage.

 La comparaison sur la pénétration du marché par les biosimilaires amène une certaine comparaison avec celle des génériques dans d’autres pays notamment les Etats-Unis (à prix très élevé, à forte pénétration du générique, avec quelques années d’avance sur le marché français). Au Canada, l’approche semble volontariste et programmée pour un développement rapide sur la base d’une liste de biosimilaires bien plus large comparée à celle (2 molécules : filgrastim et le pegfilgrastim !) contenue dans l’arrêté du 14 avril 2022 du Journal Officiel ; d’où la perplexité des pharmaciens étant donné le nombre d’articles lus depuis des mois sur les enjeux médico-économiques de cette substitution. L’élargissement de cette liste semble vraisemblablement inéluctable afin de conserver l’équilibre fragile entre molécules innovantes et capacité financière à les prendre en charge collectivement. Les conférences qui se succèdent à l’ASCO, l’ESMO ou à la MASCC démontrent l’approbation sur ce sujet de la communauté des oncologues et des équipes de soins de support en cancérologie. 

D’après une conférence De Toronto, congrès MASCC, juin 2022 : New and Emerging Agents on Outcomes of Febrile Neutropenia: Addressing Clinical Gaps , Jeffrey Crawford, MDM, Member of ASCO, IASLC, ESMO, MASCC, US